Une nouvelle règle inspirée du Règlement Rome II (Cass. Civ. 1ère, 9 septembre 2015, N°14-22794)
L’action directe de la victime d’un dommage à l’encontre de l’assureur du responsable a donné lieu à de nombreuses jurisprudences s’agissant de la recevabilité de cette action, lorsqu’il existe une composante internationale, que la victime soit liée ou non au responsable par un contrat.
La jurisprudence, jusqu’à peu établie, de la Cour de cassation posait le principe suivant :
« l’action directe de la victime contre l’assureur du responsable est régie, en matière de responsabilité contractuelle comme en matière de responsabilité quasi-délictuelle, par la loi du lieu du dommage » Civ. 1ère, 20 décembre 2000, n°98-15.546.
Le principe posé par la Cour de cassation imposait un raisonnement en deux temps, la recherche du lieu du dommage pour déterminer la loi applicable, puis la vérification de la recevabilité de l’action directe de la victime en application de cette loi.
Ce raisonnement n’a pas manqué de surprendre s’agissant de la référence au lieu du dommage, habituellement réservée à la responsabilité délictuelle.
Le Règlement n°864/2007 du 11 juillet 2007, sur la loi applicable aux obligations non contractuelles (Rome II) a apporté une précision textuelle à cette pratique établie par la jurisprudence, mais uniquement en matière délictuelle, son champ d’application. L’article 18 du Règlement prévoit « la personne lésée peut agir directement contre l’assureur de la personne devant réparation si la loi applicable à l’obligation non-contractuelle ou la loi applicable au contrat d’assurance le prévoit »
La jurisprudence de la Cour de cassation a aujourd’hui également été précisée en matière de responsabilité contractuelle.
En effet, les dispositions du Règlement Rome II ne sont pas applicables aux relations contractuelles et le Règlement n°593/2008 du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles, dit Rome I, ne contient pas de dispositions spécifiques relatives à l’exercice de l’action directe de la victime à l’encontre de l’assureur du responsable.
C’est donc la Cour de cassation qui intervient en la matière par un arrêt du 9 septembre 2015, rendue par la Première chambre civile.
La Cour de cassation vise les articles 9, 10 et 11 du Règlement CE n°44/2001 du 22 décembre 2000, ainsi que l’article 3 du Code civil pour poser un attendu transposant mot pour mot l’article 18 du Règlement Rome II aux obligations contractuelles :
« la personne lésée peut agir directement contre l’assureur de la personne devant réparation si la loi applicable à l’obligation contractuelle ou la loi applicable au contrat d’assurance le prévoit »
On peut se réjouir de l’abandon de la référence à la loi du lieu du dommage s’agissant d’une responsabilité contractuelle dont la mise en œuvre paraissait inappropriée en cette matière.
La référence à la loi du contrat entre l’assuré et la personne lésée, plus cohérente avec la responsabilité encourue, soumet néanmoins l’assureur à une éventuelle action directe chaque fois que la loi du contrat entre l’assuré et la personne lésée autorise ce type d’action.
Les jugements et arrêts à venir nous permettront de déterminer si ce nouveau fondement a entraîné une augmentation des actions directes portées devant les juridictions françaises.
Jessika DA PONTE