Arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation du 15 septembre 2015, N°14-17964
La Chambre commerciale de la Cour de cassation vient une nouvelle fois de préciser sa jurisprudence relative à la rupture brutale des relations commerciales sur le fondement de l’article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce.
Pour mémoire, en droit français, les prévisions contractuelles des parties en matière de rupture des relations contractuelles et commerciales peuvent s’avérer insuffisantes, et ce même si elles ont été strictement observées. Les exigences fixées par la loi, notamment celles de l’article suscité, doivent également être respectées.
Selon cet article, sont à la fois nécessaires (i) la notification par écrit de la rupture et du préavis et (ii) le respect d’un délai de préavis suffisant au regard de la durée des relations commerciales entretenues, des relations commerciales antérieures pouvant être prises en compte dans la détermination de cette durée selon les applications jurisprudentielles de cet article. Dans un arrêt du 15 septembre 2015, la Chambre commerciale refuse explicitement que les relations contractuelles et commerciales nouées avant la cession d’un fonds de commerce soient prises en compte pour calculer la durée des relations commerciales entretenues entre l’acquéreur du fonds et un prestataire, et donc pour estimer la durée du préavis « suffisant » au sens de l’article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce.
En l’espèce, le 14 avril 2006, l’acquéreur d’un fonds de commerce avait mis fin à la relation contractuelle et commerciale initialement nouée en 1998 par l’ancien propriétaire du fonds avec un prestataire de transport, en lui accordant un préavis de 4 mois.
Cette rupture était intervenue quinze jours après la cession du fonds de commerce et alors que le nouvel acquéreur exploitait le fonds de commerce depuis 5 mois en location-gérance.
La Chambre commerciale décide que la seule cession du fonds de commerce ne permet pas d’établir que l’acquéreur du fonds ait eu l’intention de poursuivre les relations commerciales initialement nouées par le propriétaire antérieur du fonds de commerce avec des prestataires. Les relations commerciales antérieures ne doivent donc pas être systématiquement prises en compte pour la détermination de la durée du préavis « suffisant » (au sens de l’article L.442-6,I,5° du Code de commerce).
Naturellement, il est peu probable que la Chambre commerciale écarte définitivement, et en toute circonstance, la continuité des relations commerciales en cas de cession des critères de détermination de la durée suffisante de préavis (au sens de l’article L.442-6,I, 5° du Code de commerce) et la portée de cet arrêt ne doit donc pas être surestimée.
Il pose toutefois des limites non négligeables à l’obligation de prendre en compte la continuité des relations commerciales, lorsque l’on souhaite justement y mettre fin.
Solène Marais